Les incubateurs foisonnent à Montréal. On pense au Lab culturel, au CEIM, à La piscine ou encore à Centech. Deux nouveaux ont vu le jour récemment, L’Écurie, une initiative de Media Ranch, en collaboration avec Québecor Média, et Zù, une idée de Guy Laliberté. Lors du Forum sur les industries culturelles, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a réuni Sophie Ferron, présidente, productrice exécutive de Media Ranch, et Nadine Gelly, directrice générale de Zù, dans une discussion avec Céline Huot, vice-présidente, Stratégie et développement organisationnel de la Chambre de commerce.

L’Écurie est née tout simplement parce que Media Ranch ne trouvait pas de créateurs pour développer des formats, genre dans lequel se spécialise Sophie Ferron depuis de nombreuses années. « Tant qu’à former des pigistes, autant le formaliser, explique cette dernière. Il n’existe pas d’expertise des formats au Québec. » Québecor Média a embarqué, l’entreprise misant sur les contenus exportables. De son côté, Zù s’est donné comme mission de devenir un hub créatif ouvert aux créateurs dans un espace où ils pourront protéger leurs propriétés intellectuelles. « Tout de suite, en partant, nous voulons avoir un produit qui nous appartient et qui nous permettrait de faire nos propres productions », précise Nadine Gelly.
La différence se trouve dans le fait d’être locataire ou propriétaire de la propriété intellectuelle, illustre Sophie Ferron. Celle-ci demeurera donc ici et les gens qui ont fait partie de son développement seront protégés. Certes, Montréal et le Québec ont connu de grands succès à l’international, mais le nombre de productions exportées demeure faible, ajoute Nadine Gelly. Sur 36 964 brevets déposés au Canada en 2014, à peine un peu plus de 4 000 étaient Québécois, sans doute parce que nous n’avons pas cette sensibilité, estime la directrice générale de Zù. Depuis cinq ans que Media Ranch développe des formats, le milieu vient tout juste de comprendre de quoi il en retournait. Au Canada anglais, des productions sont distribuées à l’international, mais très peu au Québec, si l’on excepte des séries comme « Un gars, une fille », mais soyons sérieux, cela date de la fin des années 1990. La patronne de Media Ranch met beaucoup d’effort là-dessus. « Les gens que nous allons former vont mieux comprendre le genre, cela va permettre de changer les moeurs et les attitudes », note-t-elle.
Pour la directrice générale de Zù, il faut être fier de ce que l’on crée et qui nous appartient. « Il est important de comprendre les marchés étrangers, dit-elle. Quand on crée, il faut penser si les conditions sont bonnes pour l’exportation et si on connaît ces marchés. On parle beaucoup de l’Asie, toutefois, il faudrait regarder davantage vers les marchés qui nous ressemblent. » Elle appelle d’ailleurs les entreprises de marketing québécoises à mieux connaître les marchés extérieurs.
Dans l’incubateur L’Écurie, les créateurs apprendront comment créer pour exporter et leurs projets feront partie du catalogue de Media Ranch. « Il ne faut pas penser que nous allons le faire tout seul, précise Sophie Ferron. Nous trouverons des partenariats. D’ailleurs, les banques devraient mieux comprendre les formats. » De son côté, Nadine Gelly donne en exemple Felix & Paul Studios et de leur expérience avec Oculus. Si le Centre Phi n’avait pas investi temps et argent dans ce projet, peut-être que Felix & Paul aurait pris plus de temps pour faire sa marque. « Il faut davantage de modèles comme celui-là, lance-t-elle. Nous avons besoin de philanthropes. Il faut que Montréal devienne un laboratoire pour les entreprises internationales qui veulent développer des nouvelles technologies et non pas attendre que celles dont les technologies sont déjà en place s’installent ici. »